La Grand Place

Au milieu des habitations sérrées et des rues parfois très étroites de la ville, une place s'ouvre. Elle est gigantesque. Jamais déserte. Elle est le centre de la ville d'Hisai.
Tout la populace d'Hisai s'y croise et s'y recroise.

Mais il s'y déroule aussi les plus sombres des transactions. Meutriers, voleurs, rénégats, bannis ... Cette place calme et ouverte d'apparence est l'un des lieux les plus dangeureux de la ville.
Il est le centre de la guerre des clans. Le centre dont chacun cherche à avoir le controle.

Prenez garde aux coins sombres .....

L'air était lourd. Le ciel gris et bas menacait de se déchirer à tout moment. Il n'était pas tard, pourtant les lampes à huile et les torches diffusaient déjà leur lumière. Malgré le temps et l'heure du couvre feu approchant, nombreuse était encore la foule sur la Grand Place.
Tarim était sur le qui-vive. Cela ne l'empèchait pas d'arborer un visage profondément indifférent et détaché de la situation. Il ne pouvait en être autrement.

L'heure du rassemblement avait sonné. Une fois par lune, la Meute se réunissait pour choisir le nouveau lieu de résidence de la Princesse. Cette mesure les avait protégé du Consorsium ces dernières années.

Un mouvement quelques mètres devant lui attira son attention. Il chercha des yeux une seconde ce qui l'avait tiré de ses pensées.
L'instant suivant une jeune femme apparaissait à sa gauche. Un léger sourire traversa ses lèvres. La Princesse arrivait toujours à tromper sa vigilance.

Par contre le fait qu'une dizaine de soldats venaient d'entrer sur la place n'était pas passé inaperçu. Tarim porta doucement la main à sa dague. Les soldats du Consorsium n'étaient pas là par hasard. Ce qui venait de trancher la question était l'apparition du Général en chef des armées du Consorsium : Margaï Konpan.

Son garde du corps était là. Comme prévu. Elle s'en était approché avec une discrétion qui faisait des jaloux parmi ses compagnons d'armes. Comme d'habitude elle l'avait surpris, même s'il n'avait rien montré de son étonnement à la voir soudain sans prévenir.

Elle l'aurait bien taquiné, comme elle se plaisait à le faire. Il était comme un frère pour elle. Mais aujourd'hui elle n'avait pas le temps : des soldats prenaient peu à peu position autour de la place et au sein même de celle ci.
Tarim les avait vu mais Alera retint doucement son bras. Sans lui accorder un regard elle murmura :

Va prévenir l'Assemblée, il ne doivent pas être découvert.

Son garde du corps ne bougea pas. Alera se rapprocha imperceptiblement.

Konpan n'est pas là par hasard. Le rendez vous a été éventé et la réunion aussi à tous les coups. Va les prévenir, c'est un ordre.

Tarim continuait de compter les soldats du Consorsium. Il y en avait maintenant une vingtaine. Alera perçut pourtant sa réponse dans un murmure.

Et vous Princesse ?

La jeune femme sourit. Ses doigts caressèrent la poignée de son sabre, habilement camouflé sous sa cape. Il faudrait qu'elle donne du temps à Tarim pour que celui puisse sortir de la Place. Et contre autant d'hommes dans une telle foule, elle ne tiendrait pas longtemps. Un article de la loi martiale en vigueur à Hisai se rapella à elle ...
Il traitait des peines encourues pour le meurtre d'un personnel du Consorsium comme ils les appellaient.

Ramène quelques uns de tes camarades. Vous ferez diversion.

Elle vit le jeune homme hocher la tête. Et alors qu'il faisait demi tour en mettant son capuchon pour masquer son visage elle ajouta :

Si je suis désarmée vous ferez demi tour sans hésiter une seconde ... Compris ?

Elle le vit marquer un temps d'hésitation, devinant parfaitement les traits de son visage et ses machoires serrées par le cruel ordre qu'il venait de recevoir. Elle savait qu'elle ne pouvait lui imposer plus dur, lui dont la seule voie était de la protéger.

Il sera fait selon vos ordres, pour la Meute.

Alera le regarda s'éloigner quelques secondes puis elle attendit patiemment les soldats qui traversaient la place, fendant la foule qui s'était immobilisée, controlée par une peur qui tenait leurs boyaux. A chaque sortie de ce genre, il y avait des coups de fouets et du sang versé. Le Consorsium était intouchable, comme ses soldats. La présence du plus cruel d'entre eux, leur général, promettait une place couverte de sang pour la nuit.
Elle mettait au point son plan d'attaque. Retardant son premier coup pour gagner du temps. Une fois engagé le combat serait en sa défaveur.
Beaucoup de soldats, assez d'espace pour tous, et une foule qui pouvait devenir incontrolable et imprévisible ...
Elle ferma les yeux pour se concentrer un instant.

Il aimait cette sensation de puissance. Marchant d'un pas cadencé à la tête d'une escouade de solsats il venait de pénétrer dans l'enceinte de la Grand Place.
Un silence religieux s'était fait.
Ses yeux balayaient la foule. Ca et là il apercevait des gueux et des mendiants. Ceux là ne méritaient que les coups et les humiliations. En plus cela permettait aux soldats de se divertir. Mais aujourd'hui il avait donné des consignes strictes.

Aujourd'hui était un jour différent. Un jour exceptionnel.
Aujourd'hui il allait mettre les orateurs dans la poche et s'assurerait le siège de Consort à la occasion.
Il avait des informations sures qui lui assuraient la présence de la chef des rebelles Loups Garous avec un minimum de protection. C'était l'occasion révée. Il allait l'arrêter, l'humillier et ramènerait sa tête au Consort. Le seul problème consistait maintenant à la trouver.
Les descriptions différaient et les rumeurs les plus folles et les plus stupides courraient sur l'identité de cette femme. Parmi les plus ridicule il y avait celle qu'elle pouvait se transformer en animal à volonté, une hérésie en laquelle Margaï ne croyait pas une seconde. Des rumeurs affirmaient également qu'elle n'avait pas 20 ans. Ce qui était stupide étant donné la prudence dont elle faisait preuve. Cela faisait des années qu'elle parvenait à se cacher non seulement elle mais aussi les survivants Lycans, ces monstres assoifés de sang ... Il allait mettre fin à ça aujourd'hui.

Il observa un instant une dizaine de ses soldats prendre place pour interdire toute entrée et toute sortie de la Grand Place. Un sourire apparut sur ses lèvres. Il imaginait la tête des rebelles en voyant débarquer une cinquantaine de soldats à leur petite réunion.

Alors qu'il reportait son attention sur la place, un aveugle le bouscula. C'était un vieil homme dont les yeux étaient depuis longtemps voilés. Margaï le repoussa.

Ne m'approche pas vermine ! s'exclama le Général d'un ton qu'on aurait difficilement pu faire plus méprisant.

L'aveugle qui n'avait pas vu à qui il s'était cogné reconnu la voix et blémit tentant de bredouiller des excuses. Margaï, loin d'en être apitoyé porta la main à sa dague. Ces résidus devaient tous être supprimé, pour le bien du Consorsium.
C'est alors qu'il ne passa quelquechose d'innatendu. Une jeune fille sortit de la foule pour aider le vieil homme à se relever.

Laisse le là où il est il ne mérite que ça ! intima le Général avec autorité. A sa grand surprise la jeune fille releva la tête vers lui et l'observa un instant, comme si elle était étonnée d'une telle réaction.

Général, commença-t-elle après avoir observé les épaulettes de son interlocuteur, cet homme vous a présenté de sincères excuses. Ses yeux l'ont trahis, on ne peut l'en blamer.

Soufflé.
Margaï était soufflé.
Cette fille ne le connaissait pas. Il laissa le manche de sa dague pour prendre celui de son épée.
La fille se redressa. Margaï sortit sa lame.

Général dans mon pays quiconque met lame au clair devant une autre personne invite cette personne au duel.

Ici quand je sors mon épée c'est pour tuer, pas pour jouer, répliqua sèchement le général.

La jeune fille haussa les épaules et sortit d'un fourreau qu'il n'avait pas vu un sabre. Elle le gratifia d'un : "Moi non plus je ne joue pas".

Ainsi il allait battre cette fille présompteuse. Qui sait si elle se battait bien il lui offrirait peut être le choix de sa mort. Un sourire mesquin au visage il passa à l'attaque devant une foule et des soldats médusés.

Bien longtemps.
Voilà bien longtemps qu'elle attendait ce jour.
Le jour où son sabre et l'épée de cet homme allait se croiser.

Jouer les étrangères n'était pas bien difficile. D'autant plus que chez la Meute la règle était ainsi. Sortir son arme c'était réclamé la vie de l'autre et donc un duel. Ca le Général Konpan ne le savait pas. Il ne savait pas tellement de choses, où en savait si peu.
Un ignorant qui se complaisait dans son ignorance, puisque cela lui apportait la gloire des autres ignorants.
Cependant Alera ne devait pas se laisser prendre par ses sentiments personnels. Elle était étrangère. Ce prétexte avait suffit à détourner les yeux du général de son but initial, elle devait rester une étrangère, et donc ignorer tous les méfaits et la cruauté de son adversaire.

Non, ce n'était pas un adversaire.
C'était une proie.

Elle était en garde, bien que celle ci soit très découverte, invitant à l'entame. Lorsque le général passa à l'attaque, Alera se demanda même si l'invite était utile. Elle était face à un animal enragé.
Et les animaux enragés elle connaissait.

Avec calme elle para le premier coup. Son sabre décrivit un arc de cercle que Margaï contra. Ainsi la lutte avait commencée.
Peu à peu Alera se plongea dans le combat, laissant son instinct et ses réflèxes dicter ses réactions. Ses coups étaient précis et volontairement "parables". Elle ne voulait pas finir ce combat trop vite. Ses compagnons arriveraient bientot. Là elle tuerait sa proie et disparaitrait dans la foule.

Peu à peu Margaï augmenta son niveau. Il était expérimenté et jusque là il avait jaugé son adversaire. Alera savait que cela ne serait pas forcément facile. Elle imprima un rythme au combat. Son rythme.
Ses coups précis, ses esquives fines, ses parades finissant en contre attaque à chaque fois. En quelques minutes seulement elle avait réduit le général à un état défensif salutaire.

Il n'en revenait pas. Une rage l'envahissait.
Qui était cette gamine pour le menacer ainsi ?
Sa fureur explosa soudain, sans prévenir.
Il se jetta à l'attaque. Il sentit la brulure d'une lame sur son bras mais l'ignora. Son coup était imparable. Il avait tué bien des hommes ainsi. Et des hommes doués.

La lame ne la toucha même pas.
La jeune fille s'était effacé. Lui Margaï Konpan, général du Consorsium alla s'écraser par terre, emporté par son élan. Sur son flanc une longue trace rouge.
Elle avait versé son sang.
La blessure n'était pas grave mais l'ego était meurtri.

Il fit volte face avec un sourire sardonique sur le visage.

Soldats à moi ! Emparez vous d'elle !!

Après un instant de flottement et un regard méprisant de son adversaire, Margaï vit une dizaine de soldats encercler la jeune fille. Pensant qu'elle se rendrait il fut surpris de voir un de ses soldats s'écrouler, la gorge ouverte comme celle d'un animal.
Son regard croisa celui de la responsable. Il frissona.
Ses hommes passèrent à l'attaque.
En quelques secondes plusieurs s'écroulèrent, d'autres vinrent en renfort.
Quelques instants plus tard un cri bref mit fin à la mélée.

La fille était à genoux. Son sang perlait en plusieurs coupures.
Son sabre lui avait échappé. Un soldat vint le tendre à Margaï. Chacun savait qu'il aimait garder les armes des vaincus.
Après avoir réajusté son uniforme et passé une cape, qui masquerait ses blessures, le général s'approcha de la prisonnière.

Deux soldats l'encadraient, pourtant son regard était toujours aussi haineux.

Pensais tu réellement que je te laisserais gagner ?

Elle se contecta de cracher à ses pieds.
Il avait en horreur la fierté des vaincus. Les vaincus devaient accepter leur défaite et se conduire en vaincus. Le revers de son gantelet alla frapper le visage de sa prisonnière récalcitrante.
Comme pour mieux savourer l'instant il fit le tour de sa captive. En passant derrière elle il remarqua une plaie plutot profonde dans le dos. Sans doute la raison de sa défaite. Ainsi ses soldats avaient retenus ses leçons. Si la solution n'est pas de face elle sera de dos.

Il revint face à elle et déclara :

Tu as insulté, bléssé et tué des membres du Consorsium. En tant que général, j'appliquerais la loi martiale avec rigueur, au mot près.

Avec un sourire il marqua une pause.

Qu'on lui ote sa cape et qu'on prévienne Chicot. J'ai besoin de son meilleur fouettard.

Il regarda sa victime et à nouveau son regard lui donna des frissons. Jamais personne ne l'avait fait reculé mais cette gamine lui faisait froid dans le dos au sens propre. Une raison de plus pour s'en débarasser dans l'art et la manière.
Il se ressaisit et annonça d'un voix forte et claire :

Tu recevras 15 coups de fouet puis tu seras conduite au Pont du Consort, auquel tu seras pendue, de sorte que chacun puisse te voir agoniser.

Contrairement à ce qu'il avait espéré elle ne trembla pas, ne blémit pas. En fait cette annonce ne changea absolument rien à l'attitude de sa prisonnière. Elle avait l'air de s'en foutre complétement.

Alera sentait son sang coller ses vêtements à sa peau, couler le long de ses flancs, envahir sa bouche. Elle savait que la blessure qui barrait son dos était inquiétante. Dans peu de temps elle faiblirait.
Les paroles du général étaient le dernier de ses soucis. Elle savait ce qu'elle risquait. Et por l'instant son énergie se traduisait par la haine dans son regard envers Konpan.
Elle le vit trembler et une joie immense l'envahit. Malgré son état, elle avait gagné.

On lui ota sa cape, laissant apparaitre sa chemise ensanglantée. Les deux soldats la prirent chacun sous une épaule mais elle se dégagea pour se relever seule.
Son adversaire semblait déstabilisé par sa conduite mais elle ne cèderait pas.

Deux hommes arrivèrent au pas de course. Ils avaient fait vite. Le premier était vieux et Alera se douta qu'il devait s'agir de Chicot si l'on en croyait sa dentition catastrophique. L'autre était grand, large, musclé et portait un fouet à la ceinture. Ce serait sans doute lui qui éxécurterait la sanction.

Les soldats du Consorsium se placèrent en cercle sur ordre de leur général. Ils délimitaient ainsi une zone libre pour l'application de la peine.
Alera fut condutie dans le cercle et le bourreau l'y accompagna. Il portait une cagoule bien entendu. Un lache. Personne n'assumait réellement ses actes.
Elle savait comment cela se passait.
On lui proposerais de lui bander les yeux. Elle refuserait.
On lui proposerais de se mettre à genoux. Elle refuserait.
On voudrait lui lier les mains. Elle refuserait.

Quelques minutes plus tard le bourreau déroulait son fouet et armait son bras.
Une première fois le fouet claqua. Dans le vide. Faisant sursauter la foule silencieuse. Le second claquement fit serrer la machoire à Alera.
Le coup suivant lui fit l'effet d'une décharge le long de la colonne. Le troisième coup lui arracha un cri étouffé.
Au cinquième elle vacilla.
Au septième elle posa un genoux à terre pour se relever immédiatement mais le suivant l'en empècha. Elle tomba à genoux.
Au dixième un cri s'échappa de ses lèvres. Elle sentait le cuir du fouet décoller ses chairs de ses os.
Il fallait qu'elle tienne. Il le fallait. Elle n'avait pas le choix.

Tarim avait fait aussi vite qu'il le pouvait. L'Asemblée avait été dissipée, les combattants étaient resté pour accueillir les soldats du Consorsium et lui et 5 hommes étaient repartis vers la Grand Place.

Le spectacle qu'il y vu le révolta. Au plus profond de son ame, dans chaque fibre de son corps. Les membres de la Meute l'accompagnant se figèrent eux aussi. Tout les 6 sur le toit d'un batiment, il avait une vue générale de la place et chacun observait la scène avec une longue vue.

Le claquement du fouet était audible de tous. Les cris brefs et étouffés au possible l'étaient aussi. Chaque son brisait un peu plus le coeur des Lycans.
Leur Princesse, réduite à cet état, à genoux, recevant le fouet comme un esclave. Pourtant, malgré la douleur et l'humiliation que cela entrainait elle gardait la tête haute. Aucun regret de ses actes.
Et chaque Lycan se reconnaissait là. C'était bien le sang du fier peuple Asham qui coulait dans les veines d'Alera, de la Louve.

Un des hommes esquissa un mouvement et aussitot Tarim réagit.

Non. Elle a donné des ordres.

Mais ... Ils la torturent. C'est son sang qu'ils versent.

Et crois tu qu'elle veuille qu'ils aient l'occasion de verser le tien inutilement. Garde ton sang pour défendre ta famille. répliqua sèchement Tarim.

Un autre homme intervint.

Nous devons quand même faire quelquechose. Nous ne pouvons la laisser ainsi. Nous ne pouvons les laisser la traiter comme une esclave.

S'ils la traitent ainsi c'est qu'ils ignorent qui elle est. Je ne doute pas que la Princesse fassent tout pour protéger son peuple.

Que faisons nous alors ? demanda le plus jeune des combattants.

Nous allons nous placer prêt du Pont, si elle tente quelquechose ce sera là. Et nous pourrions l'y aider. décréta le garde du corps.

Tarim reporta son regard sur la place. Un dernier coup de fouet traçait une ligne rouge dans le dos de sa souverraine. La jeune femme se crispa puis vacilla pour se laisser partir en avant contre le pavé de la Place. Deux soldats la saisirent sous les bras et la relevèrent sans ménagement.
Margaï Konpan donna un ordre et tous se mirent en marche.
Lui et ses hommes se retirèrent dans l'ombre. Ils seraient au pont bien avant le convoi.

Petite brune aux cheveux de jais.
Assise bien sagement sur une murette.
Regards calme.
Posé sur une scène d’une rare violence.
Gwen n’étais pas une petite brune, et si son regard étais calme, face a la scène qui se jouait devant elle, c’était simplement qu’elle en était l’un des acteurs. Le mercenaire souris en pensant au marques laissées sur son dos par le lycan auquel il avait arraché le lieu et l’heure de rendez vous, pour le compte du consortium.
Ils voulaient la peau de leur chef, d’après les renseignements habilement soutirés par la jeune femme à l’un des gardes.
Sauf que la fille qui avait été prise n’était pas un chef. C’était une jeune fille. Bien que ses actes soient d’une rare bravoure, dans cette ville ou, visiblement, ce mot n’avait plus cours.
Peu être que… si Gwen faisais un petit effort… après tout, ce ne serais pas la première fois qu’elle se retournerait contre un employeur… sauf que la elle n’avait pas encore été payée.
D’ailleurs le serait’ elle jamais ? L’attitude du consortium à son égard était plus qu’insolente. Certes elle n’était qu’un tueur. Mais elle était la meilleure. De passage dans la ville, elle avait trouvé une belle opportunité de se faire facilement quelques écus.
Mais avec un peu de recule… oui, le consortium ne la payerai pas. Et si elle n’allait pas rejoindre la jeune fille sur son pont et au bout de sa corde, elle aurait de la chance.
Les yeux verts s’illuminèrent, alors que la jeune femme sortais de se rêverie.
La Louve.
Parmi les coups de fouet, devenu trop classique pour l’assassin qu’elle était, une pensée c’était insinuée en elle.
La Louve.
L’adolescent que Margaï Konpan faisait fouetter sans vergogne n’était autre que la Louve. Et cet ignare décérébré l’ignorait. Seul sa manière de se battre, ou même sa fierté à affronter les coups auraient du mettre le générale sur la voie. Mais trop orgueilleux, il ne l’avait pas vu…
Gwen allait peut-être être payée finalement…

La jeune fille qu'était Nalys traversait la place anonymement, plus loin dans la foule, elle savait qu'Erlana la suivait. Cela ne la dérangeait pas. Au début oui, être suivie l'avait mise hors d'elle, seulement Erlana gardait ses distances et la colère de Nalys était retombée. On la protégeait et c'était normal.
Nalys s'éloigna de la place et s'enfonca dans les rues sombres.

Un peu plus loin elle grimpa souplement sur un mur et gagna un toit. Elle eut envie de laisser l'animal qui était en elle faire surface et hurler le désespoir et la tristesse que son coeur refusait de montrer. Mais Alera lui avait appris à ne pas laisser l'animal sortir de sa cage sans une question de vie ou de mort.
Il en allait de la sécurité des Ashams, de la Meute. Moins ils se montraient et plus longtemps ils vivraient.

Elle arriva finalement sur un toit qui dominait la place. D'un regard elle balaya la grande étendue grisatre, autrefois blanche de la place d'Hisai. Ainsi c'était là qu'Alera ... Oui c'était là. Cela sentait le sang, son sang, mais aussi cela de tellement d'autres personnes que s'en était presque effrayant.
Son coeur blessé fut soudain comme un peu apaisé.

Erlana était derrière elle. Debout, immobile, Nalys le savait sans avoir à se retourner.

Un coeur si blessé en était émouvant. Erlana n'avait pas reçu d'ordre mais elle sentait au fond d'elle même qu'il ne fallait pas laisser l'Héritière seule. Au départ elle n'avait pas compris où allait Nalys.
Puis arrivée à la place elle avait cru comprendre mais non, la jeune fille s'en était éloignée.
Finalement, debout sur un toit, avec une vue imprenable sur la place d'Hisai, Erlana avait compris ...

Nalys cherchait des réponses. Notamment aux questions : pourquoi ? comment ? Il se passait tant de choses. Si tous étaient conscients que chaque jour pouvait être le dernier, personne n'avait voulu imaginer la disparition de la Princesse et les conséquences que cela aurait. Pourtant ils y étaient.
Le lendemain, l'Héritière et 3 Loups partiraient pour le territoire des Otoris. Manoeuvre délicate. Il faudrait respecter leurs coutumes. Ne pas les offenser.

Erlana se glissa jusque derrière Nalys, silencieusement mais sans masquer sa présence. Elle ne voulait pas la déranger.

Elles restèrent ainsi un long moment. Puis Erlana fronça les sourcils, quelqu'un venait.

Vous devriez rentrer, Nalys.

Chicot menait sa patrouille à travers la ville. Il avait reçu l'ordre de tuer quiconque ne respecterait pas la loi. Et il avait repéré une silhouette sur un toit.
Se promener sur les toits était suspect.
Et être suspect était interdit.

Il avait donné l'ordre à ses soldats de se diriger vers le batiment en question.

Vous devriez rentrer, Nalys.

Ces mots la tirèrent de se pensées. Elle réalisa soudain qu'il y avait une présence. Elle sentit son coeur accélérer, non par peur mais par excitation.

Je reste, je ne te laisserais pas seule, répondit Nalys avec un sourire.

Partez tout de suite, répliqua Erlana avec autorité. Ce n'est pas un jeu.

Nalys se retourna. Elle saisit soudain qu'Erlana avait raison.

Et toi ?

Le regard d'Erlana suffit à répondre à sa question. Nalys, avec une grace féline se fondit dans la nuit pour retrouver la sécurité de leur abri.

Erlana attendit de ne plus sentir la présence de Nalys avant de se concentrer sur ses adversaires. Alors qu'ils parvenaient au toit elle prit la direction opposée à celle de Nalys et entraina les soldats du Consorsium dans un coin sombre.

Eux devaient la prendre pour une proie, elle se savait prédateur.

Un coup d'oeil en arrière l'informa qu'une patrouille complète la poursuivait, soit 6 hommes. Alors il faudrait se satisfaire de 6 hommes, car ils étaient une chance inespérée de se libérer de toute cette rage qui habitait la louve qu'était Erlana. L'affront à la Princesse, qu'elle avait en partie élevée, ne trouvait pas de pardon chez elle.
Elle les tuerait jusqu'au dernier.

Au fond d'une impasse elle se retourna et mit lame au clair.

La suspecte avait fuit. Pas vraiment une surprise. Chicot, du haut de ses 57 ans, menait la poursuite. C'est qu'il y avait une motivation supplémentaire : c'était une femme qu'ils suivaient.

Il remercia le ciel que la fuyarde soit stupide pour se jetter d'elle même dans une ruelle sombre et sordide, une impasse qui plus est. Puis soudain il se passa quelquechose de vraiment surprenant, la jouvencelle fit volte face et tira une épée.

Chicot éclata de rire, dévoilant à tous son hygiène bucale déplorable. Il tira son arme et ordonna à ses hommes de faire de même.

Faites en de la bouffe pour chiens, elle ne mérite que ça ! cria-t-il en pointant son épée en direction de leur future victime.

Ses hommes passèrent à l'attaque.

Erlana se mit en garde.
Manier l'épée n'était pas son occupation favorite mais on disait que son maniement était semblable à une danse. Manier l'épée, elle n'aimait pas ça en particulier, pas comme la Louve ou Nalys qui se plaisaient à étudier l'art des armes. Non Erlana préférait sauver une vie que d'en supprimer une.
Sauf que parfois, se servir de son épée lui apportait du plaisir.
Et ce soir était un de ces moments.

Les chiens c'étaient eux. Ils allaient payer pour tous les actes cruels qu'ils avaient commis. Elle attendit que le premier soldat se jette sur elle pour simplement placer sa lame de sorte qu'il s'y ouvre la gorge.
C'était fascinant la façon dont une lame pouvait trancher tout ce qui faisait la vie en un être. Elle se contenta de tenir la lame et l'homme glissa se long du tranchant. Le sang gicla, éclaboussant le visage et le doux sourire d'Erlana.

Déjà un second homme arrivait, c'est y était, le premier venait de toucher le sol, les yeux voilés, mort. Erlana plongea sa lame dans le corps du second soldat, à travers son uniforme pourtant destiné à le protéger un minimum.
La lame perça le coeur, le transperça. Un cri franchit enfin les lèvres du soldat dont les yeux exhorbités fixaient Erlana en guise d'une réponse.

L'Asham fit un pas en avant, la lame frola l'armure avec un chuintement puis s'enfonca par le cou, laissé sans protection, perça la chair, suivit l'oesophage, transperça un poumon, trancha l'aorte, puis atteignit les visères. Erlana retira la lame d'un geste précis, cela fit un gargouillis que seule la femme entendit puisque les compagnons du jeune soldat n'entendirent que son rale d'agonie mélé de surprise.
Un nouveau jet de sang qui macula la chemise d'Erlana.

Les trois survivants regardèrent cette meurtrière avec éffarement. Comment ? Qui était-elle ? ...

Erlana posa son regard de braise sur ses trois dernières proies.
Celui qui était le plus proche d'elle tourna les talons, la louve se jeta sur lui, un léger balayage et il s'écroulait au sol. L'épée se glissa avec assurance entre deux vertèbres cervicales. Erlana n'avait même pas eu besoin de regarder, connaitre le corps avait des avantages thérapeutiques mais pas que.
Un soldat se jeta sur elle, un peu surprise de tant de courage, elle réagit avec un temps de retard. Sa souple esquive lui permit de contre attaquer rapidement, seulement sa surprise lui avait valut une entaille sur le haut du bras donc s'écoulait maintenant un filet de sang. Son geste fut pourtant sur et sans hésitation.
La lame passa outre la garde adverse et la pointe trouva l'arrière du menton. Elle perça la peau, traversa la bouche, explora les sinus puis réduit un hémisphère cérébral complet en bouillie. Le sang qui coula le long de la lame jusqu'au manche hypnotisa un instant Erlana qui ne vit pas le plus vieux de la patrouille, et le plus gradé aussi, partir à reculons, comme horrifié de la scène qui s'était jouée sous ses yeux.

Erlana se tira de sa fascination et regarda le vieil homme tenter de fuir l'inévitable.
Elle essuya sa lame et la remit au fourreau.

Comment était ce possible ?
Cette femme n'était pas humaine ... C'était un démon !

Elle regardait dans le vide, s'était le moment, il recula doucement pour bientot courrir pour fuir.

Le plus étrange c'est que ce combat s'était fait sans un bruit de métal. Sans le tintement du fer croisé. Ca n'avait pas été un combat ... Non ... Mais pourtant si ... Il y avait eu 5 hommes armés d'un coté, une femme armée de l'autre et un affrontement ...
Ce silence avait été horrible.
Non c'est les corps de ses 5 soldats qui étaient horribles. C'était cette froideur assassine ...

Chicot s'égarait.
Soudain il comprit qu'il n'avait aucune chance. Un loup blanc se tenait devant lui.

Allez savoir pourquoi, il était certain, perduadé que c'était une louve.

Erlana n'avait même pas cherchée à courir, elle avait laché sa part animale sur le bougre qui fuyait. En quelques secondes ce fut une louve blanche qui localisa rapidement sa proie. Elle trouva un raccourcie et attendit.

Oh il ne fallut pas bien longtemps avant que le soldat du Consorsium arrive.
En la voyant il s'était figé.

Elle pouvait presque entendre les battements de son coeur devenir chaotique ... Elle s'approcha lentement, sachant qu'il serait à la fois terrifié et à la fois fasciné par cet animal majestueux, sorti de nullepart qui avançait vers lui comme l'aurait fait un être humain.

Erlana lorsqu'elle fut assez près bondit vers sa gorge, il n'eut même pas le temps de crier, les machoires se refermèrent sur son cou. Elle serra, serra, et serra encore jusqu'à sentir la nuque de disloquer.
Là elle relacha sa proie et s'éloigna tranquillement.

Un peu plus loin ce fut une femme qui sortit des ruelles sombres pour se diriger en toute discrétion vers le refuge des siens.